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Extrait de Cette Semaine #84, fév/mars 2002, p.33

Depuis mars 2001 a lieu à Berlin le procès de cinq personnes, Matthias Borgmann, Sabine Eckle, Harald Glöde, Axel Haug et Rudolf Schindler, accuséEs d'appartenance aux RZ (Revolutionäre Zellen, cellules révolutionnaires) ainsi que d'attentats commis entre 1986 et 1991.

Ce procès n'est pas un fait unique et isolé puisqu'on peut déjà le mettre en parallèle avec l'arrestation à Paris, le 16 janvier 2000, de Sonja Suder et Christian Gauger, deux autres présuméEs membres des RZ qui avaient disparu d'Allemagne depuis 1978 1. De manière plus générale, ce procès s'inscrit dans un contexte de répression en Europe. En Allemagne, comme en Italie ou ailleurs, on tente ainsi de clore le chapitre de la lutte armée. Or si l'état allemand a réussi, depuis longtemps déjà, à tuer ou à enfermer pour des années de nombreux/ses membres de la RAF ou du mouvement du 2 juin, il a, malgré de nombreuses tentatives de coups de filet et perquisitions en tous genres, toujours eu beaucoup de mal à mettre la main sur des RZ et à les faire juger, soit qu'elles/ils réussissent à disparaître, soit par manque de preuves 2.

Ce procès illustre également l'emploi de toute une législation anti-terroriste qui avait été votée sous la forme de lois d'exception dans les années 70, et qui depuis ne cesse d'être réactivée 3. Ainsi, les accusÉs tombent-ils/elle sous le coup du paragraphe 129a qui punit "l'appartenance à, le soutien à, ou la publicité pour une association terroriste", et c'est la législation sur les repentis qui a rendu ce procès possible puisque tous/toute sont inculpéEs sur la base des déclarations du repenti Tarek Mousli.

Enfin, avec ce procès, se posent les questions habituelles quant à la manière dont s'organise la solidarité. Dès le début de cette affaire, un comité de solidarité s'est mis en place à Berlin, organisant le soutien financier ainsi que plusieurs manifestations. Le principal débat avec ce comité, qui se veut le plus large possible (comprenant des membres des églises, des Verts, du PDS ...), porte sur le fait d'assurer une défense essentiellement et pointilleusement juridique, évitant de faire référence aux RZ, les avocatEs allant même jusqu'à demander à ce que le mot de "traître" ne soit jamais prononcé en public pour qualifier Mousli, car cela signifierait qu'il y avait quelque chose à trahir et irait donc à l'encontre de la ligne de la défense qui cherche à démontrer l'innocence des accuséEs. Pourtant, et c'est ce qu'expriment certaines personnes dont l'un des accuséEs, l'occasion est toute trouvée, non seulement pour discuter de ce qu'ont pu être les RZ, mais surtout de ce que cela peut vouloir dire aujourd'hui. Il ne s'agit pas de faire leur hagiographie, leur l'histoire est suffisamment complexe et ils/elles ont produit assez de textes critiques sur leur fonctionnement et leurs actions pour que cela ne soit pas le cas, d'autant plus que sur certains points on peut avoir du mal à se sentir proche d'elles/eux quand on est libertaire 4. Il s'agit de manifester sa solidarité avec des individuEs qui ont refusé toute déclaration aux keufs, ce qui ne peut que nous les rendre sympathiques, et qui sont aux prises avec une répression qui guette toutes celles et tous ceux qui se révoltent tout en ne rejetant aucun moyen de lutter, et de se montrer solidaires d'actes, dont on peut dire qu'ils sont toujours d'actualité, car, depuis, rien n'a changé.

1. Les mandats d'arrêt, émanant du BKA, mentionnaient les motifs de meurtre et tentative de meurtre pour deux attentats à l'explosif en 1977 à Nuremberg et Frankenthal, ainsi qu'une tentative d' incendie contre le château d'Heidelberg.Cependant ils ont tout d'abord été libéréEs sous caution puis l'extradition a été refusée par l'état français, pour cause de prescription de sa part pour ce qui est de l'appartenance au RZ et de manque de preuves pour les autres accusations ( reposant là encore sur des déclaration du repenti Hans Joachim Klein).

2. Le fait qu'il s'agisse de groupes autonomes, organisés de manière décentralisée et non hiérarchique (le mot d'ordre était "créez beaucoup de cellules révolutionnaires!") a certainement constitué un facteur déterminant. Apparemment, la plupart des membres des RZ n'entraient pas non plus en clandestinité mais faisaient aussi partie de mouvements légaux.

3. Introduit le 24 juin 1976, le paragraphe 129a a ensuite été élargi en 1986 afin de pouvoir également être appliqué à de petits groupes autonomes. Les Verts qui à l'époque clamaient leur volonté d'abroger le 129 a, viennent de voter son élargissement à toutes les "organisations criminelles et terroristes étrangères" par l'article 129b dans le cadre des "Sicherheitspackete" (mesures "de sécurité" qui ont suivi les attentats du 11 septembre).

4. Même si les RZ se sont toujours défendu de vouloir être avantgardistes, on peut citer à ce propos l'article publié dans le numéro 114 de "Radikal" de mars 1983 (page 22) où on peut lire : " Dans le rapport qu'elles entretiennent avec les mouvements de masse, les RZ ont de plus en plus eu tendance à faire le lien avec ces mouvements en voulant éduquer les masses à la militance et à l'offensive grâce à leurs actions, les incendies et les attentats à l'explosif faisant office de baguette pédagogique. On ne peut accepter un tel rapport éducatif".

Extrait de Cette Semaine #84, fév/mars 2002, p.33

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